Dans l’univers de Joanie Ecuyer, CoCo Création


Il y a quelques semaines, j’ai eu la chance d’être accueillie dans l’atelier de Joanie Ecuyer, la talentueuse créatrice de la marque CoCo Création. Je t’emmène dans son univers à la découverte de la création d’une collection de vêtements upcyclés!

Avec Joanie, tout est réalisé à partir de matériaux récupérés. Un sacré challenge mais également une belle opportunité de créer des pièces qui ont du sens et un supplément d’âme.

J’étais d’abord partie dans l’optique de réaliser uniquement un portait vidéo. Mais l’approche de Joanie est tellement passionnante que je ne pouvais me résoudre à ne garder qu’un extrait de ce qu’elle m’a confié. La vidéo est donc suivie d’une interview plus complète.

Hâte de découvrir tes impressions en commentaire!

Comment est né CoCo Création?

CoCo Création est né pendant le confinement. J’étais alors danseuse et comédienne en préparation d’un spectacle quand tout s’est arrêté. J’avais donc du temps pour explorer cette autre passion. Et puis un matin, j’ai eu cette idée d’upcycling; créer des accessoires avec de la récup’. Je ne pensais pas me retrouver ici deux ans plus tard.

Quel est ton dernier gros projet?

Il s’agit de la préparation d’une toute première collection complète (printemps/été 2023) que j’ai eu la chance de pouvoir présenter lors de la Fashion Week de Vancouver, deuxième plus grande Fashion Week d’Amérique du Nord après celle de New York.

Collection printemps/été 2023 CoCo Créations

Trois looks de la collection Printemps/Eté 2023

Quelles sont les grandes étapes de la création d’une collection upcyclée?

La première étape est évidemment celle du tri, du rangement. Aller chercher les tissus à droite et à gauche. Découdre. Découper. Trier. Nettoyer. Ranger. Etc…

J’observe alors mes tissus. Toutes ces chutes, ces vêtements, toute cette matière. Je range, je trie, puis je mets de côté ce qui me parle. Ce qui me touche.

Dans un même temps, je me penche sur la thématique que j’aimerais explorer. Le fil rouge, en quelque sorte. J’écris un texte. Mes pensées autour de ce sujet. Je viens de la danse et du théâtre, et l’écriture fait partie de ma vie depuis toute petite. C’est pour moi une étape très importante. Puis, je re-plonge dans mon stock de récup’. Petit à petit des idées se forment, et je démarre. Parfois je dessine. Parfois non. Parfois je crée un patron. Parfois non. Cela dépend.

Je pars toujours de la matière, du coup, le plus souvent c’est elle qui m’inspire et je dois d’abord la travailler, recréer « la nouvelle matière, le nouveau tissu » pour avancer.

Alors, une fois que ces tissus sont assemblés, recrées, imaginés. Il y a la confection. Les essayages. Les modifications. Les échanges. Puis, enfin les finitions.

Et alors, la présentation des pièces. Les essayages sur les mannequins, les photos ou défilés.

Toutes ces étapes ne sont pas toujours dans le même ordre, ou surtout, elles se chevauchent beaucoup. Mais c’est plus ou moins de cette manière que je crée une collection.

Quelle étape préfères-tu?

La période de création/confection. Quand je passe des idées qui tournent en bouclent dans ma tête à la confection, puis les essayages. L’assemblage des pièces les unes avec les autres. En bref, le moment où ça prend vie.

Parce que quelque chose de nouveau est né, sous mes mains et mes yeux. Parce que cela ne ressemble pas toujours à ce que j’avais prédit. Et tant mieux. J’adore l’inattendu. Et je dois être prête à lâcher prise sur certaines idées en pleine création. Parce que la matière ne correspond pas, ne convient pas. Parce que je n’ai finalement pas assez de matière (c’est souvent le cas) et je dois adapter mon idée. Parce que j’en ai d’autres qui arrivent, lorsque je vois ce que je crée. J’aime donc beaucoup l’étape où tout change. Où tout bascule. C’est inattendu. C’est vivant.

Après, j’aime aussi beaucoup l’étape du tri. Enfin, spécialement celui où je déballe les trésors qu’on me donne. J’ai l’impression d’ouvrir des cadeaux, comme une enfant à Noël.

Et enfin, l’étape où je vois mes créations portées est magique elle aussi. C’est assez nouveau pour moi. C’était totalement nouveau à la Fashion Week de Vancouver. J’étais extrêmement stressée par cette étape. Mais c’était magique.  J’ai toujours aimé, dans la création (déjà étant chorégraphe ou metteur en scène), quand mon travail ne m’appartient plus.

Quelle étape est la plus compliquée?

L’étape des finitions. Parce que je suis perfectionniste et la moindre petite erreur, le moindre petit point de travers, me déçoit tellement. J’ai une formation de couturière, mais j’aimerais tellement en savoir plus encore. Maîtriser parfaitement ce que je fais. J’apprends. L’upcycling ce n’est pas seulement de la couture. C’est un univers à part. Je ne choisis pas les tissus avec lesquelles je vais travailler. Je ne vais pas en magasin les acheter, même en seconde main. Je les reçois. Alors oui, je choisis parmi mon stock. Mais je n’ai souvent pas le plus facile à travailler. Notamment les tissus de tapisserie ; chutes et échantillons de vente du tapissier/décorateur. Ce sont des matières incroyablement belles, nobles et je les considère comme des trésors. Mais le velours, les petits reliefs et la rigidité de certains tissus sont très difficiles à travailler et notamment dans les finitions. J’apprends. Lesquelles je vais pouvoir utiliser, de quelle manière, avec quelles finitions.

J’apprends tous les jours. Et j’adore apprendre et évoluer. Donc tout ce que j’ai appris en couture parfois me sert, mais bien souvent je dois faire mes propres armes.

Notamment aussi parce que ce sont des minuscules chutes de travail que je récupère et je manque souvent de matière pour terminer une jolie finition.

Ou alors, le mélange des couleurs m’empêche d’accorder mon fil, mon biais, etc. Toutes ces choses qui sont importantes dans un vêtement de prêt-à-porter et qui perdent totalement leur importance dans l’upcycling. Mais là encore, cela repousse les limites de la créativité. Alors même si l’étape n’est souvent pas simple et me fait perdre énormément de temps, elle me permet aussi de pousser mes limites et les limites de l’upcycling.

Etapes de créations Coco Création

Illustration de quelques étapes de création

Quels sont tes projets pour la suite?

Actuellement, je suis en préparation de la nouvelle collection pour l’automne/hiver 23/24. Je prépare huit nouveaux looks qui sont encore une fois inspirés de la nature et de mon parcours de gymnaste et danseuse. Tout se rapproche de moi et je puise dans ces énergies et ces souvenirs.

J’ai reçu une invitation de Flying Solo, un incubateur pour designers émergents, pour participer à la Fashion Week de Paris en mars. Après avoir osé postuler, j’ai été sélectionnée pour y prendre part et c’est ce qui m’a lancée dans cette nouvelle collection.

Ensuite, fin mars, je participe à l’UN-Dress Fashion Show. C’est un défilé, concours et Pop-Up à St-Gall, organisé par Oikos St-Gall, pour les marques suisses, éthiques et écologiques. J’ai été sélectionnée sur dossier également ; un dossier de plusieurs pages sur l’éthique et l’écologie de ma marque, mes valeurs et visions de cet univers et du monde en général. J’y présenterais dix looks ; des pièces de la premier collection SS23 et des pièces de la nouvelle collection.

Puis après, j’aimerais pouvoir mettre en place la re-confection de certaines pièces de mes deux collections. Évidemment, le vêtement ne sera jamais le même puisque je n’ai pas assez de tissus dans chaque couleur pour refaire le même, mais garder le patron/la forme et le refaire en plusieurs couleurs, matière et tailles pour les proposer à la vente.

J’aimerais aussi pouvoir faire évoluer ma marque, mon entreprise. Pour cela, j’ai quelques idées en tête. Mais tout prend du temps et surtout, coûte. Je dois donc pouvoir vendre, pour réinvestir dans ma marque et mes prochaines idées.

Mais toujours continuer également à proposer des collections instinctives. Ou collection capsule.

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Pour suivre CoCo Création

Pour voir le défilé de la Fashion Week de Vancouver